Expérience employé

2022.12.05

La semaine de 4 jours : un élan en voie de se confirmer?

Les dernières années ont entraîné de grands bouleversements sur les plans économique et sociétal. Ces transformations se reflètent inévitablement sur le milieu du travail qui évolue à vitesse grand V. On n’a qu’à penser au travail à distance dont la généralisation aurait jusque récemment été impensable. À la lumière des excellents résultats obtenus, d’autres habitudes sont aujourd’hui remises en question. Après la formule hybride permettant de partager son temps entre le bureau et la maison, la semaine de quatre jours s’annonce-t-elle comme la voie d’avenir?

Les raisons abondent pour favoriser son adoption. À commencer par l’intérêt des employés pour cette formule qui favorise un meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle. En retour, l’expérience semble indiquer que les gains de productivité compensent généralement la réduction des heures de travail. Dans un contexte où la concurrence est vive pour les talents, cette approche ajoute aussi une dimension attrayante à toute marque employeur. Avec de tels avantages, le choix semble évident, mais, comme pour tout changement significatif, il exige des gestionnaires une planification rigoureuse, ainsi qu’une consultation de l’ensemble des parties prenantes internes et externes. Elle peut certainement contribuer à l’amélioration de l’expérience employé.

On ne saurait non plus considérer la semaine de quatre jours comme une panacée. Peu d’exemples de son implantation à grande échelle peuvent servir de référence quant à son impact à long terme et à la pérennité des avantages qu’on lui accorde. Elle n’est, par exemple, pas adaptée à tous les secteurs d’activité et le succès de sa mise en place demeure relativement aléatoire. Afin de mettre toutes les chances de votre côté, nous vous proposons un tour d’horizon des constats obtenus sur le sujet et certaines règles à suivre pour s’engager dans cette voie en toute confiance.

Nouvelle organisation du travail : compréhension et tendances

La semaine de 4 jours, de quoi parle-t-on ?

La semaine de 4 jours, telle qu’on la connaît, peut se concrétiser de différentes manières. Les variables peuvent être les heures travaillées par jour, le découpage des heures dans la journée ou bien selon la saisonnalité de l’activité de l’organisation.

Nous pouvons énumérer différents types de cas de figure :

  1. Faire 40 heures en quatre jours, sans aucune modification de l’organisation du travail (ou de sa charge) pour l’employé ni réduction de salaire de son côté ;
  2. Faire 32 heures en quatre jours, avec une nouvelle organisation du travail et une charge de travail différente pour l’employé. Ce dernier peut accepter une réduction du salaire ou continuer à percevoir la totalité de sa rémunération (32 heures payées 40 heures), à condition que le coût soit absorbé par l’employeur ou par des subventions publiques ;
  3. Une alternance entre une semaine de quatre jours et une semaine de cinq jours, ou la possibilité de revenir sur des semaines de cinq jours lors de périodes occupées

Revoir la structure traditionnelle, mais de quelle façon?

Chaque organisation ayant sa propre réalité, le passage à un horaire de quatre jours peut prendre différentes formes. Veut-on que le personnel fasse le même nombre d’heures avec des journées plus longues? Vos employés sont-ils prêts à accepter une baisse de leurs revenus en échange de travailler moins d’heures? Aurez-vous à engager davantage de personnes pour couvrir toutes les plages horaires? Toutes ces questions se posent et doivent être abordées pour choisir la formule la mieux adaptée à vos besoins. Celle suscitant le plus d’engouement est sans conteste l’approche 100-80-100 selon laquelle le personnel reçoit 100 % de son salaire en effectuant 80 % des heures précédemment travaillées, mais avec une hausse de productivité permettant de maintenir 100 % de l’apport réalisé. Une autre option est de conserver le même nombre d’heures travaillées et de le répartir sur quatre journées de plus longue durée. Enfin, il est également possible d’alterner entre les semaines de quatre et cinq jours avec l’objectif de fournir un long week-end toutes les deux semaines. Les possibilités sont multiples, mais vous devrez tenir compte des attentes à l’interne, mais aussi de celles de vos clients habitués à un niveau et une qualité de service éprouvés.

Une tendance qui s’installe

Si on ne peut parler à l’heure actuelle de mouvement généralisé, la semaine de quatre jours continue de gagner du terrain dans de nombreux pays. La France a fait office de précurseure avec le très bref règne (1996-1998) de la loi Robien qui offrait un incitatif financier aux entreprises participantes, mais cet élan s’est vite essoufflé. L’Espagne a récemment repris ce principe en offrant des subventions gouvernementales pour compenser le coût salarial de la cinquième journée non travaillée. L’Islande demeure un modèle à suivre alors qu’environ 80 % de sa force de travail est sur le point de passer à l’horaire de 4 jours. Enfin, l’Angleterre tente actuellement la plus vaste expérience du genre alors que 3000 personnes réparties au sein de 70 entreprises font partie d’un projet-pilote destiné à évaluer les impacts de la semaine de quatre jours. Plus près de nous, la tendance s’accélère aux États-Unis, mais demeure relativement confinée aux startups et aux PME au Canada. Une chose est certaine, le mouvement est en croissance alors que le nombre de personnes travaillant sur l’horaire de quatre jours a triplé entre 1973 et 2018 aux États-Unis, selon les données du bureau national de la statistique.

Les avantages de la semaine de 4 jours l’emportent-ils sur les inconvénients?

Au printemps 2022, l’organisme sans but lucratif 4 Day Week Global associé à l’Université d’Oxford a mobilisé 38 entreprises états-uniennes et canadiennes dans le cadre d’une expérience de six mois pour analyser les retombées de la semaine de quatre jours. Les résultats sont à venir, mais les observations réalisées dans le cadre de projets similaires laissent penser qu’ils seront dans l’ensemble positifs. Les avantages sont en effet intéressants :

• Meilleur équilibre travail/vie personnelle

Une journée libre en semaine est une véritable bénédiction pour les familles dont les deux parents travaillent et peinent à trouver le temps pour régler les tâches courantes ou s’occuper des enfants. Plus généralement, cette journée permet de reprendre des forces et de revenir plus motivé au travail.

• Productivité accrue

La nécessité d’accomplir ses tâches à l’intérieur d’un échéancier plus restreint incite à être plus concentré sur la tâche et à perdre moins de temps sur des activités non liées au travail. Une expérience menée auprès de 2300 employés de la division japonaise de Microsoft, à qui on a offert une grande flexibilité d’horaire, s’est notamment soldée par une augmentation de 40 % de la productivité et un indice de bonheur accru.

• Bonification de l’image de marque de l’organisation

Dans un marché très compétitif pour le recrutement de la main-d’œuvre et dans lequel les talents potentiels recherchent toujours plus de flexibilité, la semaine de quatre jours donne l’image d’une organisation ouverte et attrayante.

En retour, la décision d’opter pour l’horaire restreint peut aussi présenter certains inconvénients :

• Hausse du stress

Moins de temps équivaut aussi à plus de pression et possiblement à plus de stress. Tous les employés ne seront pas nécessairement en mesure d’effectuer 100 % de leurs tâches à l’intérieur de délais plus serrés. Cela peut mener à de l’épuisement et à une hausse de l’absentéisme.

• Ne convient pas à tous les secteurs d’activité

Certains domaines et industries requièrent une disponibilité constante sur 5 ou même sur 7 jours par semaine. La gestion des horaires peut ainsi devenir un défi complexe et avoir une incidence négative sur les opérations d’entreprises devant, par exemple, répondre à des appels de service de leurs clients.

• Augmentation des coûts en main-d’œuvre

La productivité ne compense pas toujours la réduction des heures de travail. Il sera parfois nécessaire d’engager du personnel supplémentaire pour maintenir le même rythme. Dans ce cas, l’employeur devra en assumer les coûts et pourrait remettre en question la pertinence de l’horaire de quatre jours.

Selon la nature et la situation particulières de votre organisation, il faut ainsi évaluer ces différents aspects lorsqu’on contemple l’idée d’instaurer la semaine de quatre jours. Une telle initiative doit faire l’objet d’une planification judicieuse, tout en étant communiquée de façon claire à votre équipe, à vos clients et à l’ensemble de vos partenaires externes.

Comment mettre en place la semaine de 4 jours?

Des pistes à suivre pour une implantation réussie

La mise en place de la semaine de quatre jours ne devrait pas être gérée comme un projet secondaire. Son succès requiert un changement de mentalité et un engagement réel de la direction envers les vertus d’un tel exercice. Il faut être prêt à faire confiance à la capacité de l’équipe de s’adapter et surtout comprendre que des ajustements seront inévitablement nécessaires en cours de route. La consultation du personnel, y compris les membres de la direction, et la mise en place d’indicateurs de mesure sont aussi des étapes à ne pas négliger.

Une fois la décision prise, le déploiement d’un plan de communication visant à la fois le personnel et les clients est un must. Une implantation graduelle sous la forme d’un projet-pilote permet aussi de déterminer ce qui fonctionne mieux et moins bien, avant d’étendre le projet à l’ensemble de l’entreprise. Une fois cette étape franchie, un suivi demeure nécessaire pour continuer d’apporter les correctifs requis sur le long terme.

Votre organisation est-elle prête à faire le saut?

Beaucoup de chemin a été parcouru depuis qu’Henry Ford a créé la semaine de 40 heures sur cinq jours au début du siècle dernier. Le milieu du travail évolue rapidement et les employés recherchent des entreprises proactives qui leur offrent la flexibilité requise pour se réaliser pleinement, à la fois sur le plan personnel et professionnel. Dans cette nouvelle réalité, la semaine de quatre jours est une approche qui continuera visiblement de gagner en popularité. Comme il ne s’agit pas d’une science exacte, le moment est venu de pousser la réflexion plus loin pour déterminer si cette approche peut aider votre entreprise à mieux performer. Pourquoi ne pas prendre votre vendredi pour y penser?

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